La chimiothérapie topique est une approche thérapeutique complémentaire pour le traitement des néoplasmes conjonctivaux superficiels—dans les cas où les cellules tumorales sont limitées à l’épithélium (également appelées tumeurs in situ). Cette méthode, généralement proposée après la chirurgie, consiste en l’application directe d’agents cytotoxiques sur la surface oculaire afin d’éliminer les cellules tumorales résiduelles.

Traitement adjuvant (post-chirurgical)

La chimiothérapie topique est utilisée comme thérapie adjuvante après m'exérèse chirurgicale pour réduire le risque de récidive locale des tumeurs conjonctivales malignes telles que le carcinome in situ et le mélanome in situ. Cette approche peut éviter des résections larges en ciblant les cellules tumorales microscopiques que la chirurgie seule ne peut éliminer complètement.

Traitement néoadjuvant (pré-chirurgical)

Dans certains cas sélectionnés, la chimiothérapie topique peut être utilisée en première intention, notamment dans les situations suivantes :

  • Tumeurs étendues : pour les lésions volumineuses où une chirurgie immédiate serait défigurante, la thérapie néoadjuvante peut réduire le volume tumoral et permettre une ablation chirurgicale plus conservatrice par la suite.
  • Emplacements difficiles : les tumeurs touchant les canthus, les points lacrymaux ou s’étendant sur les paupières peuvent bénéficier d’une cytoréduction chimique initiale.
  • Tumeurs multifocales : plusieurs lésions ou une néoplasie conjonctivale intraépithéliale étendue peuvent justifier un traitement topique initial.

Mitomycine C (MMC)

La mitomycine C est la référence en matière de chimiothérapie topique oculaire. Il s’agit d’un antibiotique antitumoral alkylant qui crée des liaisons croisées dans l’ADN, inhibant ainsi la réplication cellulaire. Il cible sélectivement les cellules à division rapide, caractéristiques des néoplasmes conjonctivaux épithéliaux.

5-Fluorouracile (5-FU)

Le 5-FU est une alternative à la mitomycine C. C’est un antimétabolite pyrimidique qui inhibe la thymidylate synthase, une enzyme clé de la synthèse de l’ADN. Cela provoque un déséquilibre en nucléotides et bloque la progression du cycle cellulaire.

  • Concentration
  • Posologie
  • Durée du cycle
  • Jours de pause
  • Nombre de cycles

Mitomycine C (MMC)

  • Concentration
  • Posologie
  • Durée du cycle
  • Jours de pause
  • Nombre de cycles

5-Fluorouracile (5-FU)

  • Concentration
  • Posologie
  • Durée du cycle
  • Jours de pause
  • Nombre de cycles

Le traitement cyclique permet d’augmenter l’efficacité tout en réduisant la toxicité :

  • Phase active : pendant la période de traitement, les cellules tumorales en division sont détruites par l’agent cytotoxique. L’application répétée maintient une concentration thérapeutique locale du médicament.
  • Phase de repos : l’intervalle sans médicament permet la régénération de l’épithélium conjonctival sain, tandis que l’activité résiduelle du médicament continue d’agir sur les cellules tumorales restantes grâce à sa persistance dans les tissus.

Préparation et conservation

Ces collyres chimiothérapeutiques ne sont pas disponibles en pharmacie de ville et doivent être préparés en pharmacie hospitalière. Ils nécessitent une réfrigération et une protection contre la lumière en raison de leur stabilité limitée après reconstitution.

Technique d’instillation

Préparation :

  1. Se laver soigneusement les mains
  2. S’asseoir ou s’allonger, la tête légèrement inclinée en arrière
  3. Nettoyer l’œil avec une solution saline stérile si nécessaire

Instillation :

  1. Tirer doucement la paupière inférieure pour former un sac conjonctival
  2. Instiller une goutte dans le fornix conjonctival, en évitant le contact entre l’embout du flacon et l’œil
  3. Fermer doucement les yeux pendant 1 à 2 minutes
  4. Essuyer l’excédent avec une compresse stérile

Précautions après instillation :

  • Éviter de se frotter l’œil pendant au moins 30 minutes
  • Utiliser un cache-œil si nécessaire
  • Se laver immédiatement les mains après l’application

Une inflammation légère avec rougeur conjonctivale est fréquente et indique l’activité du traitement. Cependant, la toxicité de la chimiothérapie—selon le médicament et le dosage—peut provoquer :

  • Kératite ou ulcérations cornéennes/conjonctivales sévères (causant douleur et sensibilité à la lumière)
  • Syndrome de sécheresse oculaire sévère
  • Cicatrisation excessive avec formation de symblépharon

Prise en charge : tout effet secondaire significatif nécessite une évaluation ophtalmologique rapide et peut nécessiter un ajustement de la dose ou l’arrêt du traitement.

La chimiothérapie topique nécessite une surveillance médicale étroite pour évaluer la tolérance au traitement. Le suivi ophtalmologique est essentiel avant et entre chaque cycle de traitement afin de détecter d’éventuelles complications pouvant nécessiter un ajustement de dose ou l’arrêt de la thérapie. L’efficacité du traitement est évaluée ultérieurement par l’oncologue oculaire référent.