Le mélanome uvéal est une tumeur intraoculaire maligne développée à partir de cellules pigmentées appelées mélanocytes qui sont présentes à l’intérieur de l’uvée (iris, corps ciliaire et choroïde). Il s’agit de la tumeur maligne primitive intraoculaire la plus fréquente chez l’adulte.

Avec environ 500 nouveaux cas diagnostiqués chaque année en France, le mélanome uvéal est un cancer rare pour lequel un réseau labellisé par l’Institut National du Cancer existe.

Le mélanome uvéal touche principalement les populations occidentales d’origine européenne à la peau et aux yeux clairs, plutôt après l’âge de soixante ans. Il n’existe pas de facteurs de risque connu à ce jour pour la majorité des patients, même si certaines prédispositions génétiques existent (altération des gènes BAP1 ou MBD4) pour moins de 2% des patients.

Le mélanome uvéal, en raison de sa rareté, est souvent difficile à diagnostiquer. Il se développe insidieusement, longtemps avant l’apparition des premiers symptômes. Il peut se présenter comme une tache pigmentée à l’iris ou visible lors de la réalisation d’un fond d’œil, sans entrainer de symptômes. A l’inverse, il peut provoquer une baisse de l’acuité visuelle, une tache dans le champ visuel (scotome) et/ou des flashs répétitifs (phosphènes) provoqués par un décollement de la rétine.

Contrairement aux tumeurs conjonctivales, il n’est pas possible confirmer le diagnostic de mélanome uvéal par une analyse du tissu tumoral. Le diagnostic repose donc par une analyse de l’imagerie multimodale faite par un onco-ophtalmologue présent en centre expert, avec au minimum une photographie et une échographie oculaire.

Rétinophotographie et échographie de mélanome choroïdien
Photographie et échographie de mélanome irien

S’agissant d’un cancer rare, le traitement doit se faire au sein d’un centre expert labellisé (MélaChoNat) par l’Institut National du Cancer. L’objectif principal du traitement est d’empêcher que le mélanome reste actif, tout en conservant l’intégrité anatomique de l’œil et si possible de la vision.

Dans la majorité des cas, le traitement du mélanome uvéal est conservateur en utilisant une radiothérapie dédiée, principalement la protonthérapie. La conservation de la vision sera dépendante principalement du volume tumoral et de sa localisation par rapport au nerf optique et à la macula.

Dans ce cas, la tumeur est suffisament à distance de la macula et du nerf optique pour espérer une conservation de la vision après protonthérapie.

Dans ce cas, la tumeur est trop proche de la macula et du nerf optique, il y aura à terme une baisse d'acuité visuelle séquellaire après protonthérapie.

Pour cela, une pose de clips de repérage lors d’une chirurgie dédiée est effectuée en centre expert. Sauf en cas de mélanome de l’iris, on utilise une forte lumière à travers la paroi de l’œil (cornée ou sclère) pour localiser l’ombre du mélanome puis suturer à la sclère 4 clips autour ou à proximité de la tumeur. Par la suite, le traitement du mélanome se fera dans l’un des deux centres de protonthérapie oculaire en France, à Nice ou à Paris.

Les clips sont suturés à la sclère après avoir localisé l'ombre de la tumeur par transillumination.

Lorsque le mélanome uvéal est trop volumineux, en cas de récidive locale ou de complications majeures du traitement conservateur, une ablation chirurgicale de l’œil (énucléation) est nécessaire. Les médecins installent alors un implant constitué d’une bille sur laquelle sont greffés les muscles oculaires.

Sur le plan ophtalmologique, la surveillance sera précisée par l’onco-ophtalmologue référent mais celle-ci doit être prolongée car des récidives locales sont possibles, même après 5 ans à compter du traitement initial. Le traitement conservateur reste néanmoins efficace dans la grande majorité des cas (environ 95% des cas à plus de 10 ans du traitement initial). Il n’y a pas de risque qu’un mélanome uvéal migre à l’autre œil, en l’absence de métastase.

Sur le plan général, l’apparition de métastases est malheureusement fréquente, dans environ la moitié des cas. Les métastases apparaissent généralement au foie, nécessitant une surveillance prolongée pendant 10 ans par imagerie hépatique non irradiante (échographie ou IRM). Le risque est dépendant principalement du volume tumoral initial, de l’atteinte du corps ciliaire et des caractéristiques génomiques tumorales (au niveau des chromosomes 3 et 8 notamment). Le traitement de l’œil, qu’il soit conservateur ou non conservateur, ne modifie pas ce risque. Le traitement des métastases est limité à quelques thérapies, générales ou locorégionales. Une immunothérapie spécifique des métastases du mélanome uvéal (tébentafusp) est actuellement disponible en France, sous réserve d’être porteur de l’antigène HLA*A02:01 (environ 27% des populations blanches d’origine caucasienne – doi:10.1016/j.humimm.2013.06.025).

De nombreux efforts de recherche portent aujourd’hui sur les techniques d’analyse biologique du risque métastatique du mélanome uvéal, ainsi que sur le type d’échantillon analysé. Des essais cliniques sont également disponibles en France dans quelques centres experts, pour proposer de nouveaux traitements non destructeurs ou de proposer des traitements complémentaires, avant et/ou après le traitement du mélanome uvéal localisé au niveau de l’œil. Des essais de nouvelles modalités de protonthérapie (en FLASH) sont à l’étude. Enfin, des essais cliniques sont également disponibles en cas de rechute métastatique, à l’Institut Curie et au Centre Antoine Lacassagne.